Coronavirus : rejet de la demande de suspension de l'arrêté limitant les déplacements de voyageurs en provenance de Guyane

Décision de justice
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Saisi en urgence, le juge des référés du tribunal administratif de la Martinique, a rejeté la demande de la chambre de commerce et d'industrie de la région Guyane visant à faire cesser l’application de l’arrêté du préfet de la Martinique et de la Guadeloupe limitant les déplacements des voyageurs en provenance de la Guyane.

Il est rappelé qu'il appartient au juge des référés, lorsqu'il est saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 et qu'il constate une atteinte grave et manifestement illégale portée par une personne morale de droit public à une liberté fondamentale, résultant de l’action ou de la carence de cette personne publique, de prescrire les mesures qui sont de nature à faire disparaître les effets de cette atteinte, dès lors qu’existe une situation d’urgence caractérisée justifiant le prononcé de mesures de sauvegarde à très bref délai.

En application de l’article 10 du décret n°2020-663 du 31 mai 2020 applicable le 22 juin 2020, le Premier ministre a interdit, sauf s'ils sont fondés sur un motif impérieux d'ordre personnel ou familial, un motif de santé relevant de l'urgence ou un motif professionnel ne pouvant être différé, les déplacements de personnes par transport public aérien entre, d'une part, la Guyane et, d'autre part, tout point du territoire de la République.

L’arrêté du 19 juin 2020 des préfets de la Martinique et de la Guadeloupe, qui est applicable jusqu’au 10 juillet 2020, reprend cette interdiction pour ces territoires. En outre, les voyageurs concernés doivent présenter un résultat négatif d’un test RT-PCR de détection du génome SRAS et COV 2 réalisé dans les 72 heures précédant le vol. Ils sont soumis à une quarantaine d’une durée de sept jours à leur arrivée. Par dérogation, l’entrée en Martinique ou en Guadeloupe de passagers en provenance de Guyane qui n’ont pu réaliser un test RT-PCR de détection du génome SRAS et COV2 peut être autorisée sur décision expresse préalable du préfet territorialement compétent.

Pour justifier de l’urgence à ordonner la suspension demandée, la chambre de commerce et d’industrie de la région Guyane soutient que l’arrêté contesté porte une atteinte grave et immédiate à la liberté d’entreprendre, qu’il est discriminatoire et méconnaît le principe d’égalité. Elle fait valoir que la perte financière pour la chambre de commerce est considérable à supposer que la compagnie Air France maintienne la desserte, que la liaison avec la Guadeloupe et la Martinique a généré en 2019 le produit direct de 1 773 806,80 euros et la prive de chance pour présenter sa candidature au renouvellement de la concession.

Le juge des référés a relevé qu’à la date du 18 juin 2020, 1 758 cas de Covid-19 ont été détectés en Guyane depuis le début de la crise, que le nombre de cas confirmés avait doublé en une semaine traduisant l’intensification de la circulation du virus. Entre 120 et 150 cas par jour ont été confirmés la semaine du 12 au 18 juin 2020 contre 100 la semaine précédente et 50 celle d’avant. Les hospitalisations pour covid-19 ont elle aussi nettement augmenté et entre une et deux admissions en réanimation a eu lieu chaque jour depuis le 10 juin dernier. La surveillance par les laboratoires révèle un taux de positivité de 25%, en nette augmentation depuis la mi-mai. Le taux d’incidence pour 100 000 habitants est supérieur à 400 à Cayenne, Kourou et Saint-Georges. La Guyane a franchi la barre de 2 000 cas le 20 juin 2020, après avoir enregistré 204 cas positifs le 18 juin 2020, 211 cas positifs le 19 juin 2020 et 194 cas positifs le 20 juin 2020.

Le juge des référés a estimé que la condition d’urgence requise par l’article L. 521-2 du code de justice administrative n’est pas remplie eu égard, d’une part aux circonstances exceptionnelles au vu desquelles ont été prises des mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 et à la dégradation de la situation sanitaire du département de la Guyane et d’autre part, à l’intérêt public qui s’attache aux mesures de limitation des déplacements en provenance de la Guyane prises, dans le contexte actuel d’expansion des cas positifs, alors que les pertes financières enregistrées et attendues par l’aéroport Felix Eboué de Cayenne ne sont pas directement liées aux mesures contestées édictées par les préfets de la Martinique et de la Guadeloupe, la limitation de déplacements par voie aérienne en provenance de la Guyane ayant été étendue à compter du 22 juin 2020 à l’ensemble du territoire de la République par le décret du Premier ministre du 31 mai 2020.