Par deux jugements du 11 juillet 2024, le tribunal administratif de la Martinique a annulé deux décisions préfectorales prises à l’encontre de deux ressortissantes haïtiennes, en tant qu’elles fixent la République d’Haïti comme pays de renvoi en cas d’exécution d’office d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF).
Les dispositions du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) permettent au préfet d’édicter, sous certaines conditions, une mesure administrative d’éloignement du territoire national, dénommée « obligation de quitter le territoire français » (OQTF), à l’encontre d’étrangers en situation irrégulière ou dont les demandes d’asile et/ou de titre de séjour ont été rejetées. Une telle mesure d’éloignement est assortie d’une décision administrative qui fixe le pays vers lequel l’étranger peut être renvoyé en cas d’exécution d’office de la décision d’obligation de quitter le territoire français (OQTF).
Le tribunal administratif de la Martinique était saisi de deux recours contestant la légalité de décisions préfectorales d’obligation de quitter le territoire français (OQTF) édictées à l’encontre de deux ressortissantes haïtiennes et assorties d’une décision fixant la République d’Haïti comme pays de renvoi, en cas d’exécution d’office de la mesure d’éloignement.
S’appuyant notamment sur des rapports récents des Nations unies et sur un arrêt de la cour nationale du droit d’asile rendu le 5 décembre 2023, les magistrats ont estimé que la crise économique et politique qui sévit en Haïti relevait d’une situation de violence aveugle résultant d’un conflit armé interne et présentait un niveau d’intensité exceptionnelle à Port-au-Prince, ainsi que dans les départements de l’Ouest et de l’Artibonite. Ils ont conclu que le renvoi dans leur pays d’origine des requérantes, toutes deux ressortissantes haïtiennes et ayant vocation à rejoindre ou à traverser ces trois départements de la République d’Haïti, était contraire à l’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui interdit les traitements inhumains ou dégradants.
Le tribunal a en conséquence annulé les décisions préfectorales dont il était saisi, en tant qu’elles fixent la République d’Haïti comme pays de renvoi en cas d’exécution d’office des mesures administratives d’éloignement du territoire français.
>> Accès au jugement n° 2300722 du 11 juillet 2024
>> Accès au jugement n° 2400118 du 11 juillet 2024
>> Accès aux conclusions du rapporteur public sur le jugement n° 2300722
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