Refonte de la carte intercommunale de l’eau : annulation de l’arrêté de répartition des usines de production d’eau potable de l’ancien SICSM

Décision de justice
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Dans un jugement du 6 mars 2025, le tribunal administratif de la Martinique a annulé l’arrêté de répartition des ouvrages de production d’eau potable du Directoire et de Rivière-Blanche que le préfet avait édicté le 20 septembre 2023 dans le cadre de la refonte de la carte intercommunale de l’eau en Martinique.

La gestion du service public d’eau potable constitue de longue date une compétence qui appartient aux communes. Pour des raisons techniques et dans un souci de mutualisation, les communes du centre et du sud de la Martinique ont décidé, dès la fin des années 1940, de confier la gestion de leur service d’eau potable à un établissement public de coopération intercommunale dédié, dénommé syndicat intercommunal du centre et du sud de la Martinique (SICSM). Ce syndicat a toutefois été dissout en 2017, après que la compétence en matière d’eau potable ait été progressivement transférée aux trois communautés d’agglomérations de l’île que sont la CACEM, la CAESM et la CAP Nord Martinique.

Cette refonte de la carte intercommunale de l’île a nécessité d’organiser un partage des infrastructures constituant le réseau de distribution développé et mis en place par l’ancien syndicat intercommunal dissout. En l’absence d’accord entre les collectivités sur les modalités de cette répartition, les communes du Lamentin et de Saint-Joseph ont demandé au préfet de la Martinique de procéder à la répartition des usines de production d’eau potable du Directoire et de Rivière-Blanche. Par un arrêté de répartition du 20 septembre 2023, le préfet de la Martinique a décidé de transférer en pleine propriété, avec effet au 1er janvier 2027, l’usine de production d’eau potable du Directoire à la CAESM, d’une part, et l’usine de production d’eau potable de Rivière-Blanche à la CACEM, d’autre part.

La CAESM, la CACEM ainsi que les communes de Saint-Joseph et du Lamentin ont saisi le tribunal administratif de la Martinique afin de demander l’annulation de cet arrêté, dont elles contestaient la légalité.

Les magistrats ont d’abord rappelé qu’en application des règles de droit en vigueur, la répartition des usines de production d’eau potable devait être fixée dans le but, notamment, d’assurer la continuité du service public pour les usagers en donnant aux personnes publiques concernées les moyens d’exercer leur compétence. Si cette répartition peut prendre la forme de transferts d’ouvrages en pleine propriété, elle peut également prendre d’autres formes, notamment celle d’une mise à disposition partielle d’ouvrage afin de permettre à une collectivité d’utiliser un ouvrage sans en être propriétaire. 

Le tribunal a ensuite relevé que la répartition décidée par le préfet confiait à la CAESM la propriété de l’usine du Directoire et à la CACEM la propriété de l’usine de Rivière-Blanche, sans prévoir aucune mise à disposition partielle d’ouvrage. Au vu des caractéristiques des réseaux et des besoins en eau des populations des différentes collectivités, les juges ont estimé que cette répartition ne permettrait ni à la CAESM, qui ne disposait pas des capacités de production d’eau suffisantes, ni à la CACEM, pour des raisons d’interconnexion, d’assurer par leurs propres moyens la distribution du service d’eau potable sur leurs communes respectives, obligeant les deux collectivité à conclure entre elles des conventions d’achat en gros d’eau potable pour des volumes importants.

Le tribunal en conclut que l’arrêté de répartition des ouvrages de production d’eau potable méconnait l’objectif de continuité du service public pour les usagers et est ainsi illégal. Il est en conséquence annulé.

>> Accès au jugement n° 2300694, 2400065, 2400066 et 2400069 du 6 mars 2025

>> Accès aux conclusions du rapporteur public sur le jugement n° 2300694, 2400065, 2400066 et 2400069

Illustration : ©Stocklib